La prochaine toile.

Temps de lecture — < 1 minute. Le peintre démarre une nouvelle toile, tandis que sa dernière création est à peine sèche. Pour préserver son allure, pour ne pas se laisser absorber par son esprit critique et être dérouté par les louanges qui gonflent son ego. Il sait qu’une roue en mouvement est bien plus facile à tourner qu’une roue à l’arrêt. Il veut garder ce flux créatif, ce impulsion du moment, ce lien puissant entre son inspiration et son exécution. Car se reposer sur ses lauriers pourrait le compromettre.   Il y a quelques jours, j’ai reçu les premiers exemplaires de “La musique qui vient de mon cœur”, imprimés pour la famille et les amis. Tenir entre mes mains mon livre, ma toile à peine sèche, est une sensation étrange. Cette fois, c’est du concret. Ce n’est plus un simple document modifiable sur mon ordinateur. J’ai pourtant l’étrange sensation qu’il…

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En boucle.

Temps de lecture — 5 minutes. Bercé par les récits de ses aînés-explorateurs revenus finir leurs vieux jours au pays, mon père a un jour franchi le pas. Lui aussi. Il quitte l’ennui de son village en Algérie durant l’hiver 1969 pour atterrir à l’aéroport de Toulouse-Blagnac, alors que la France est paralysée par des chutes de neiges importantes. Une soirée mémorable, qui ravive l’émotion du moment avec exactitude lorsqu’il me raconte ce souvenir.  Il viendra ensuite s’installer à Beauvais, dans une petite ville de l’Oise coincée entre Paris et Amiens. Puis, une succession de choses en entraînant une autre, une ramification de son arbre généalogique est apparue avec la naissance de ma sœur, Saurya, de six ans mon aînée.    Mon père vient de souffler cette année ses soixante-treize bougies. Cinquante-trois d’entre elles en France. Au contraire des pionniers qui ont inspiré ses envies d’ailleurs, il a passé la…

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L’odeur du souvenir.

Temps de lecture — 2 minutes. Cela fait trois jours que je suis de retour dans la ville qui m’a vu naître. Trois jours que j’ai franchis la porte de notre appartement familial, là où j’ai grandi et où mes parents se sont enracinés depuis près de trente ans. Chaque retour à « la maison » est un voyage fascinant dans le temps, sans bulle spatio-temporelle, ni capsule ou véhicule extravagant. En trente ans, des milliers d’objets se sont accumulés et sont marqués par le passage des années, tandis que d’autres ont été remplacés après avoir rempli leur fonction avec brio. Les jouets jaunis, les murs qui portent les traces de mes expérimentations, ou encore les vêtements que je portais avant mes vingt-ans, tout y est. Ma chambre s’est transformée, au fil des années, mais l’odeur de mon enfance, elle, a résisté à l’épreuve du temps. Les odeurs ont ce…

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De manière indélébile.

Temps de lecture — 4 minutes. Chaque être humain possède le super-pouvoir de marquer ses semblables de manière indélébile et gagner une place éternelle au royaume de l’éphémère. Tout dépend de la façon dont on veut laisser cette marque sur les autres. Qu’on le veuille ou non, ce tatouage invisible est binaire et son effacement est impossible. Il est lié à l’impression positive laissée dans le cœur des gens ou il peut être, au contraire, la réminiscence d’une mésaventure dont on aimerait qu’elle nous quitte pour toujours. Les rapports humains sont complexes pour ne pas dire insaisissables. Pourtant, sommes-nous responsables de la manière dont une personne nous perçoit ? Dont elle croit nous connaître ? De la manière dont elle se sent à nos côtés ?    Je me dirige vers son appartement dans la douceur de ce matin d’automne, bousculé par cette réflexion. Dans quelques minutes, je vais être…

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Le Père Noël n’existe pas.

Temps de lecture — 2 minutes. Oubliez les dernières affaires juridiques écœurantes, la course à l’élection du prochain Roi de France qui inonde vos réseaux, les politiques racailles condamnés par la justice et qui continuent à nous faire la morale, les problèmes sociaux, environnementaux et humanitaires à ne plus savoir qu’en faire et les disparités économiques qui laissent des trous béants dans notre vision de l’humanité. Oubliez-les. Ou mettez-les de côté le temps de la lecture de cet article. Car il y a un mensonge bien plus grave, auquel nous avons tous été confrontés, qui nous à tous impactés, et qui s’est vu accorder une immunité d’un nouveau genre dont pas ou peu de personne ne parle : ce mensonge est celui qui pousse les parents à promouvoir l’existence du Père Noël.    Ça peut paraître risible de se dire que ce petit mensonge est l’un des plus grands canulars…

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Sur avance rapide.

Temps de lecture — < 1 minute. Des premiers pas, aux premiers mots en passant par les premiers tours de vélo, tout est allé tellement vite. Trop vite. Si vite, que la vie semble désormais bloquée sur avance rapide. Petit, on rêve d’être grand. Une fois grand, on donnerait tout pour pouvoir ralentir la cadence. Partout on répète qu’il faut profiter de l’instant présent. Mais c’est quoi au juste, vivre l’instant présent ? Peut-être qu’il s’agit de profiter de ce que la vie donne aujourd’hui, sans se projeter sur ce que nous aimerions qu’elle nous offre demain. Je n’en sais strictement rien. Les enfants semblent, en tout cas, incarner cette définition à la perfection. Eux, savent mettre leurs vies sur pause le temps d’un sourire, d’une pensée joyeuse ou d’une curiosité.    

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Mourir pour nourrir.

Temps de lecture — 2 minutes. Je suis né dans l’une des plus belles rizières du nord de la Thaïlande, dans le petit village de Ban Pa Pong Piang. Un endroit fabuleux, où le temps semble ne plus avoir d’effet sur quiconque. La vie ici se divise en deux temps : le midi, les femmes brodent de magnifiques tuniques à la lueur de la lumière naturelle qui jaillit de la fenêtre. Et le crépuscule, lorsque les premiers sons de voix retentissent, les premiers accords sont joués et les danses autour du feu rythment nos soirées. Ces chants sont-ils ceux qui font tomber la pluie que nous aimons tant ? J’aime à le penser, car nous vivons les pieds dans l’eau la majeure partie de notre vie. Et puis lorsque vient le moment de la maturation, et celui des récoltes, il nous faut quitter ce merveilleux village pour rejoindre la capitale,…

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Sur un fil de funambule.

Temps de lecture — 3 minutes. Nous sommes tous deux plongés dans le vide abyssal provoqué par le moment d’après : celui qui reprend la vie et promet un atterrissage sans parachute aux âmes condamnées par les conséquences de leurs actes. Sur le parquet gît son corps, inerte, dont le sang jaillit en faiblissant de sa jugulaire, rythmé par les dernières pulsations de son cœur. Il se répand sur le sol tel le roulement d’une vague sur le sable, dans le silence assourdissant qu’impose le bourdonnement des regrets.   L’arme du crime est serrée dans ma main droite et porte les traces indélébiles de la violence de notre altercation. Des gouttes ruissellent de la lame du coupe-papier pointée vers le sol, créant une flaque dont le fracas de chaque perle fait apparaître des encyclies. Mes tremblements se transforment en sanglots, tandis que les hurlements d’une femme, entrée à la hâte,…

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Trente-trois bougies qui partent en fumée.

Temps de lecture — 2 minutes. Nous sommes nombreux à refuser la célébration de nos propres anniversaires. Comme s’il s’agissait d’un rendez-vous à oublier, d’une date aussi banale que les trois-cent-soixante-quatre autres d’une année insaisissable, sur avance rapide. Banal, ce jour l’est à nos yeux. Mais pas au regard de ceux qui perçoivent ce moment comme la définition même de la singularité ; ceux qui nous ont vu naître et qui ont appris à nos côtés : nos parents.   Ils n’ont bien souvent pas les mots pour exprimer l’infinité de leur émotion, dont seuls les yeux incandescents, dissimulés derrière un voile de pudeur, traduisent l’intensité de leurs voyages intérieurs. L’anniversaire représente bien plus que le passage des années, tant il est lui-même marqué par les rides qui se creusent sur nos visages, et qui défigurent la vieillesse dans un compte à rebours inarrêtable. Pour saisir l’importance de ce jour…

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Le projet le plus accompli de tous.

Temps de lecture — 3 minutes. Il y a environ deux ans, je posais sur le papier les premières lignes de ce qui deviendra, au fil des mois, un manuscrit de plus de trois cents pages d’une histoire que je connais par cœur. Et pour cause : cette histoire, c’est la mienne. Mais c’est également celle de tous ceux qui ont été à mes côtés lors de mon combat contre la maladie. Pas de gnangnan, pas de faux semblants et une histoire fidèle au fil des évènements qui déroule des conversations intérieures sur la masculinité, la structure familiale, l’égo, la malbouffe, la santé et tout un tas d’autres sujets qui m’ont inspiré ce livre.   Rien ne me prédestinait à faire de mon expérience un bouquin. Il n’y a qu’à voir, lors des dix dernières années, le nombre de livres passés entre mes mains qui sont aussi nombreux que les…

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