L’autodiscipline ou l’acceptation de l’inconfort.

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L’autodiscipline, selon Thomas Frank, c’est ‘la volonté d’accepter l’inconfort’. Je rajouterai que c’est ‘la volonté d’accepter l’inconfort par soi-même, sans interventions extérieures.’ La définition de Sam Thomas Davies dissipe le brouillard entre discipline et motivation : «L’autodiscipline consiste à se pencher sur la résistance.

Agir malgré ce que vous ressentez. Vivre une vie par saconception, pas par défaut. Mais le plus important, c’est d’agir en fonction de vos pensées, non pas en fonction de vos sentiments. » Aujourd’hui, j’aimerais voir avec vous ce que l’autodiscipline peut nous apporter et in fine, comment est-ce qu’elle peut nous mener à une réelle liberté.

 

La tête dure.

 

Plus jeune, je n’en faisais qu’à ma tête à l’école ou à la maison. Je rendais mes copies aux professeurs en aillant travaillé la veille au soir ou le matin même, je lisais les livres en diagonale, je ne faisais que le strict minimum pour avoir de bonnes notes et ne pas être repéré par le sonar de mon père qui détectait les mauvaises. À la maison, je laissais traîner mes affaires partout, je ne rangeais rien, ma chambre était un fouillis organisé.

 

Collège, lycée, tout se passait relativement bien sur le plan comptable. Et puis, je découvre l’université. On me donnait le choix de venir ou de ne pas venir en cours. Je ne devais rendre de compte à personne si ce n’est à moi-même, deux fois par an, avec les examens semestriels. Ça ressemblait beaucoup à ma définition de la liberté de l’époque.

 

La première année d’université, je l’ai validé assez facilement en suivant mes méthodes de travail plus que douteuses. La seconde année, même chose. Les notes baissaient, mais je validais quand même mes semestres. En troisième année il y a avait un diplôme de Licence LEA à la clé, le niveau avait clairement augmenté, mais mes méthodes restaient elles, inchangées.

 

Quand la facilité devient difficulté.

 

Début janvier 2009, je suis sous le choc. Je viens de me ramasser pour la première fois de toute ma scolarité. Sur la feuille de résultats, je vois 7,63 de moyenne générale au premier semestre avec un lamentable 0,5 sur 20 en Économie. La pire note de toute la classe et certainement de toute l’université dans cette matière. Il m’était quasiment impossible de compenser la moyenne catastrophique du premier semestre, surtout avec mes méthodes de travail inexistantes. J’allais de toute façon passer 8 mois en Espagne, à Castellòn de la Plana, avec le programme Erasmus. Fichue pour fichue, autant profiter de cette fin d’année scolaire là-bas avant de rentrer et de me préparer à redoubler cette troisième année.

 

De janvier à mai 2009, je n’ai fait que voyager dans toute l’Espagne, j’ai profité de la plage, des musées, des matchs de football du FC Valencia ou de Villareal, des sorties entre amis et de la belle vie à l’espagnole. Je n’allais pas en cours. Ou du moins, je n’assistais qu’à quelques-uns d’entre eux. Je suis d’ailleurs arrivé la fleur au fusil à l’avant-dernière classe d’un cours que j’avais choisi plusieurs mois auparavant. Ça avait fait rire tous les élèves, mais je m’en fichais royalement. Mon année était perdue, il fallait juste que je me présente au moins une fois aux cours pour ne pas perdre ma bourse.

 

Et puis, en discutant avec des élèves Erasmus qui avaient fait toute l’année scolaire sur place, j’ai compris qu’être un étudiant étranger était un avantage. Les professeurs notaient moins sévèrement nos copies. Nous étions le 4 mai 2009, j’avais un mois pile avant le début des épreuves du second semestre. C’était ma seule et unique chance de valider mon année et de sortir diplômé. La bibliothèque de l’université restait ouverte 24/24 et 7/7 pendant le mois qui précédait les examens. Je savais que j’avais besoin d’un endroit calme et propice au travail, sans distractions.

 

Se prendre en main pour changer le cours des choses.

 

J’ai pris une décision capitale ce jour-là. J’allais passer un mois entier à la bibliothèque, jour et nuit s’il le fallait, mais j’allais rentrer en France diplômé d’une licence en Langues Étrangères Appliquées. J’ai passé un contrat moral avec moi-même. J’ai pris un bout de papier et constitué ce qui allait être mon plan d’action. Tout les cours étaient disponibles sur l’intranet de la fac, c’était parfait. J’ai imprimé tous les documents que j’ai pu pour rattraper plus de vingt-deux semaines de cours manqués en seulement quatre. J’ai ensuite divisé les semaines, puis les journées, puis les heures pour être le plus productif possible. J’avais un temps imparti pour chaque matière afin de travailler sur une thématique précise. Henry Ford aurait été fier de moi.

 

Chaque matin je me levais vers 6 h 30, je prenais un petit déjeuner et je filais à la bibliothèque. Je travaillais mes cours jusqu’à 12 h. Je faisais une pause de 30 minutes, le temps de manger un bocadillo pour ensuite retourner à ma chaise jusqu’à 20 h voir 22 h certains jours. Je ne me levais que pour aller aux toilettes ou alors faire une micro pause de 5 minutes.

 

Je me préparais des fiches, j’empruntais des bouquins, je travaillais comme un forcené, refusant les propositions de sorties de mes camarades. Après des semaines de travail intensives, j’avais perdu du poids. J’avais des cernes jusqu’au nombril, mais j’étais fin prêt et déterminé à atteindre mon objectif. J’avais bien sur beaucoup douté pendant ce mois et failli abandonner, mais finalement je n’avais pas lâché, gardant en tête ce Graal qui me pendait au nez.

 

La bonne nouvelle arrivera par email un matin de septembre 2009. Je venais d’obtenir 13,2 de moyenne sur le semestre en Espagne. En faisant la moyenne des deux semestres, j’obtenais une moyenne de 10,415 sur 20, suffisante pour valider mon année.

 

Une leçon apprise dans la difficulté.

 

J’ai appris l’autodiscipline pendant ce mois de mai 2009. Moi qui avais toujours eu des facilités dans ce que j’entreprenais, lorsque le niveau s’élevait, je fuyais. Mais cette fois, c’était différent. Je venais de me prouver à moi-même que je pouvais réaliser ce qui semblait impossible de prime abord. Et si j’avais travaillé comme cela toute l’année, toutes ces années, qu’est-ce que cela aurait donné ? Et si j’appliquais cette discipline dans tout ce que je fais ?

 

Ce jour-là, j’ai pris la décision de m’organiser, de faire des listes, de préparer des projets, de ne pas procrastiner. J’ai commencé à mettre en place des systèmes hybrides, mais qui me convenaient. J’ai compris que l’autodiscipline, associée à d’autres choses (objectifs, détermination, persévérance, résilience, etc), pouvait me permettre de concrétiser mes projets personnels et professionnels. Alors bien sur, je ne suis pas une machine. Très souvent il m’est arrivé de retomber dans mes travers, mais à force de petites habitudes, de persévérance, j’ai réussi au fil des années à maîtriser mon manque de discipline pour le transformer en un système solide qui fonctionne à chaque fois qu’il est activé.

 

Et si la vraie liberté passait par la discipline et l’autodiscipline ? Je vous parlerai plus en détails du système que j’ai mis en place dans le prochain article qui sera consacré au Bullet Journal de Ryder Carroll.

 

Wissame

 

Note de bas de page

5 timeless stratégies for building self-discipline, by Samuel Thomas Davies.

Comment fonctionne l’autodiscipline ?, de Onur Karapinar sur Medium.

6 Ways to Develop Greater Willpower and Discipline, by Jeff Hadden from Inc.com

80 citations sur la discipline et l’autodiscipline.

 

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Wissame
Wissame

Wissame Cherfi est un producteur, réalisateur, podcasteur et auteur avec une expertise de + 10 ans dans le domaine de la production audiovisuelle. Dix années qu'il met à profit désormais en tant que Consultant Créatif Freelance en aidant ses clients sur tout types de projets créatifs. « La musique qui vient de mon cœur » (2022) est son premier livre.

Publications: 82